Au milieu des années 2000, un expert libanais, renommé en archéologie orientale, en mal d'aventure et en quête d'esthétique, se rend dans le nord de l'Irak, en répondant à l'invitation d'un général détenteur d'un trésor dont l'origine est floue. Pendant deux mois, il vit au rythme de l'oasis de Cherfanieh, en compagnie des militaires et des employés jusqu' à ce que les Djihadistes envahissent la région et se heurtent aux Kurdes, alliés du Général. Soudain ce lieu hors du temps et de la géographie apparaît comme le centre du monde où déconstructions et chaos règnent. Cette histoire est le prétexte pour apporter des réflexions sur la répétition de l'Histoire, sur la part de hasard, d'aléas et de l'action de l'homme sur les guerres. L'auteur nous entraîne, avec brio, dans un tourbillon de rebondissements, digne d'un thriller, dans un contexte géopolitique propice aux spéculations les plus folles.

C’est l’histoire d’une fratrie (Dean, le grand-frère basketteur talentueux, Kaui, la petite sœur, brillante dans les études et Naiona, doté d'un don de chamane) qui se déroule entre l’île d’Hawaï où les parents tentent de survivre à la crise économique et le continent où les trois enfants vont tenter de se construire un avenir meilleur. Mais les doutes, les frustrations, les inhibitions, la culpabilité et la nostalgie de l’environnement et de la culture de l’île vont avoir raison de leurs efforts. Les voies qui semblaient toutes tracées, bifurquent et les ramènent à leur île. Naoina est le premier à briser cette résistance en tentant de se reconnecter aux énergies de Big Island, jusqu’au jour où il disparaît dans la vallée, à la recherche de la genèse de son don. La vie de la famille bascule alors, amputée de son pivot central et chacun perd pied avec l’espoir de remonter à la surface, apaisé malgré la perte immense. Ce roman choral est véritablement ensorcelant, à la fois par son onirisme et son hyper-réalisme où chaque voix dessine le destin d’une famille hawaïenne dans les années 1990 et 2000. Au-delà des méandres de l'histoire familiale, ce roman représente un témoignage social avec comme leitmotiv comprendre d’où l’on vient pour savoir où l’on va.

Trente-quatre ans après son décès, l'auteur rend un magnifique hommage à son père dont la vie romanesque a traversé le XXème siècle avec volonté, passion, intégrité morale et convictions. Le terreau familial nourrit une véritable fresque historique dans laquelle l'auteur nous entraîne : 2nde guerre mondiale, guerres coloniales, guerre froide, Mai 68, Trente glorieuses, Vème République, décolonisation, Françafrique. Les relations humaines sont au coeur du parcours de ce père, disparu trop tôt pour que le fils ne mesure son influence sur sa propre existence. Entre intimité et universalité. Toutes les émotions des relations humaines (amicales, amoureuses, filiales et intellectuelles) ponctuent le récit pour le plus grand bonheur du lecteur : entre amour et rejet, admiration et aversion, fusion et opposition.

Entre mémoire génétique et psycho-généalogie, ce roman intimiste, nous plonge dans les affres d'une femme, Alma, héritière d'un passé dont elle ne sait pas exactement en quoi il consiste. Elle a grandi dans une famille composée d'une mère somnambule, d'un père friand d'histoires d'épouvante, d'une grand-mère malade et d'un grand-père mutique (souvenirs de guerre troubles). Dans une 1ère partie, Alma tente de comprendre ce qui n'est pas transmissible, plongée dans le drame des non-dits familiaux. Dans une 2ème partie, Alma part avec son fils (atteint d'une maladie génétique le rendant insensible à la douleur) et son compagnon sur les traces du parcours de son grand-père jusqu'au Kazaksthan (dans les steppes d'Aise centrale, en passant par la mitteleuropa). La force de l'écriture de l'auteur réside dans la description de l'ossature des corps, des esprits et des âmes. Une très belle plume qui progresse entre rigueur et onirisme dans les méandres des pensées d'Alma. Quand chercher ne donne pas automatiquement le droit de trouver !

Sigmund Oropa, travaille au sein de l'Office des Fraudes de l'Union. Alors qu'à 52 ans, lassitude et découragement le guettent, il se voit confier l'affaire épineuse des camps de déplacés en Grèce. Entre idéal communautaire et réalité bureaucratique peu efficace, l'opportunité se présente de servir son idéal de justice, malgré la pression des lobbies. Informé d'une preuve de corruption caractérisée pour la construction d'un camp sur une île grecque, il se rend sur le terrain pour mener l'enquête. L'auteur nous rend attachant ce personnage kafkaïen, errant dans la machine européenne, à la recherche d'une porte de sortie honorable alors qu'il doit composer avec le machiavélisme ambiant, la manipulation et l'hypocrisie, trimballant des ancêtres italiens peu recommandables. Elu d'une cause viciée, il est rattrapé par son passé amoureux, jamais soldé. Le style est incisif, la plume cynique et le verbe grandiloquent : nous sommes partagés entre compassion, empathie et agacement. Oropa est la métaphore de la mauvaise conscience de l'Union, noble ambition courant à sa perte !