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    17 avril 2011

    Quelle lecture enthousiasmante ! Les aventures fantastiques d’Hercule Barfuss possède tous les ingrédients que j’aime et font les bons romans : une destinée romanesque, de l’aventure, un cadre historique, une vengeance, une pointe de fantastique, même une histoire d’amour... Que demander de plus !?

    Par une nuit de tempête, deux naissances ont lieu dans un bordel, un garçon (Hercule) et une fille (Henriette). Si la petite fille est parfaite à tout point de vue et l’accouchement facile, ce n’est pas le cas pour le garçon : après plus de 40 heures de travail, la mère épuisée donne naissance à un garçon au corps difforme, sourd et muet de surcroît. Le médecin qui a assisté la mère ne fonde pas beaucoup d’espoir sur la survie du bébé, qui n’a même pas poussé un cri lorsqu’il est né. Pourtant, celui-ci s’accroche à la vie et finit par grandir paisiblement dans le bordel, caché de tous. L’enfant ne communique pas, du moins en apparence, mais il s’entend merveilleusement avec la fillette née la même nuit que lui. Cependant, en échange de toutes ses tares, Hercule a hérité d’un don
    : il peut communiquer par la pensée et lire dans les esprits. Un don particulièrement dangereux dans le début du 19ème siècle où l’inquisition rôde encore...

    Les aventures fantastiques d’Hercule Barfuss est vraiment un roman captivant du début à la fin, un « page-turner » qui se dévore sans faiblir et se finit bien trop vite. Le contexte du roman, qui nous fait voyager à travers l’Europe du début du 19ème siècle et son passé inquisitorial, est très prenant et apporte de la consistance au récit. Alors que le monde moderne était en pleine évolution avec les grandes avancées technologiques qu’on lui connaît (locomotive à vapeur, électricité, premières machines volantes, etc.), il régnait encore une part de vieilles croyances séculaires qui rendaient les agissements de l’Inquisition possibles. Et ils ne faisaient pas bon vivre à cette époque quand on était différent. Preuve en est les nombreux cirques de « bêtes de foire » qui pullulaient et dont il est même fait référence ici. L’auteur explore les faits de ce siècle avec beaucoup de doigté et de recherche, et le roman devient vite captivant. La structure du récit y est d’ailleurs pour beaucoup, car l’auteur passe habilement d’une période de la vie d’Hercule à une autre en scindant le roman en plusieurs parties, ce qui apporte beaucoup de rythme au récit et tient le lecteur en haleine.

    Qui plus est, Hercule est un personnage fascinant, et malgré ses malformations qui le rendent imparfait, on s’attache à sa destinée et on vibre avec lui face aux regards cruels des autres et à leurs pensées perverses et bêtement méchantes. A travers les incursions de la psyché d’autrui, Hercule (et le lecteur) se rend vite compte que les Hommes sont perfides, manipulateurs et ont souvent beaucoup de choses à cacher. Il parviendra ainsi à déjouer un complot fomenté contre lui par l’Inquisition et à manipuler l’esprit de ses ennemis pour accomplir sa vengeance...

    Carl Johan-Vallgren mène son récit d’une main sûre et habile et l’intrigue est extrêmement bien ficelée. J’ai particulièrement apprécié la façon dont Hercule accomplissait sa vengeance, tout est parfaitement orchestré au millimètre, bien qu’il faille avoir le cœur bien accroché ! Le seul bémol au récit selon moi, étant justement que tout s’enchaîne très vite, j’aurai aimé que l’auteur prenne un peu plus de temps pour développer son intrigue (j’aurai par exemple aimé que la romance entre Hercule et Henriette soit un peu plus présente et détaillée).

    Le style de l’auteur est alerte et romanesque, ses phrases plutôt longues (le premier chapitre est d’ailleurs un peu pesant à lire) et la narration m’a tantôt fait pensé aux romans classiques qui se plaisaient à suivre la destinée d’un être infortuné (dans le style de Dickens).

    La touche de fantastique est très bien amenée et entraîne une réflexion intelligente sur le monde des sourds-muets. Personnellement, je n’avais jamais réfléchi au fait que le langage des signes était universel et pouvait donc être un moyen de communiquer avec des gens de toutes les nationalités ! Une idée vraiment très intéressante et qui rend le roman enrichissant. A ce niveau-là plus de tergiversations, je suis conquise ! A lire de toute urgence !