Une comédie sociale enlevée sur nos travers contemporains
Comment justifier un mal-être diffus quand on est jeune, élevé dans une famille aimante et bien inséré socialement ?
C'est le dilemme de Chloé, trentenaire parisienne, qui décide d'entamer une thérapie. Sa psychologue lui ayant assurée que ses parents, de jeunes retraités plein d'allant, lui cachent un terrible secret, elle n'aura de cesse de les interroger jusqu'à découvrir le pot aux roses, s'il existe. Les conséquences de cette découverte seront bien sûr fâcheuses et incontrôlables.
Victimisation, égocentrisme, l'auteur excelle grâce à son écriture ciselée et à un art du bon mot à dépeindre les caprices d'individus favorisés qui cherchent à tout prix à souffrir. Après Le Répondeur, paru en poche, qui racontait l'histoire d'un jeune imitateur prenant en charge la vie sociale et le téléphone portable d'un écrivain maudit, Luc Blanvillain réussit encore une fois à nous séduire avec une comédie noire à l'ironie douce-amère et esthétiquement irréprochable.
Martin
Un premier roman haletant et glaçant
Direction l'Alaska dans un espace uniformément blanc, vaste (comme on en découvre dans la littérature américaine édité par Gallmeister par exemple) et oppressant d'une tempête glaciale.
Bess a eu la mauvaise idée de sortir avec le "petit" et de lui lâcher la main le temps d'une seconde. Il a suffit d'un court instant, d'une petite inattention pour que l'enfant disparaisse...
Une course contre la montre s'engage afin de retrouver l'enfant, pour Bess mais aussi pour les quelques rares habitants partis à leur recherche.
Livrés à eux-mêmes, ils devront affronter cette nature sauvage et hostile, mais pas seulement elle...
Dans ce huis clos haletant où les personnages prennent tour à tour la parole, Marie Vingtras, d'une écriture concise et maîtrisée, nous plonge au coeur même du blizzard et au plus proche d'individus confrontés à eux-mêmes et à l'enfer de la culpabilité.
Marine
L'enfer est pavé de bonnes intentions
Paule est revenue à la ferme familiale pour enterrer sa mère et respecter ses dernières volontés. La citadine décide de s'occuper des poulets, de les tuer et de les vendre sur le marché du village. Végétarienne, elle imagine bientôt un mode de production inattendu et respectueux du bien-être de ses poulets et de ses propres convictions.
Derrière les apparences naïves et loufoques de cette fable moderne se cache une vraie satire des paradoxes qui travaillent les meilleures volontés face aux compromissions que nous imposent la société productiviste.
Un premier roman absurde et tout simplement génial.
Martin
« L’expérience du vertige n’est pas la peur de tomber mais le désir de sauter »
Avec ce premier roman Etienne Kern redonne vie à un homme connu uniquement pour la manière dont il a trouvé la mort.
Les images de cet homme qui s’écrase au sol après avoir sauté du 1er étage de la tour Eiffel le 4 février 1912 pour expérimenter le parachute qu’il a inventé, sont connues pour être parmi les premières de la mort filmée en direct.
Visibles par tous, elles hantent l’auteur qui raconte l’histoire vraie et dramatique de ce tailleur pour dames venu de Bohême appelé Franz Richelt.
Dans une époque ivre de progrès, qui voit des tentatives quasi-quotidiennes et souvent filmées d’envol de nouveaux aéroplanes malgré les risques et les accidents nombreux, ce personnage de roman va aller jusqu’au bout de son rêve.
Dans une très belle langue, le romancier retrace son parcours, les épreuves qu’il a traversées, les histoires d’amitié et d’amour qui l’ont mené à ce geste suicidaire…
Cela permet à Etienne Kern d’évoquer dans ce magnifique texte la mémoire de proches disparus qui eux aussi se sont « envolés » avec une mélancolie exprimée toute entière dans cette phrase : « Les gens que nous aimons, nous ne pouvons rien pour eux ».
Laurent
Un grand roman américain sur la filiation et l'altérité
Le jeune Robin est un enfant neuroatypique, il est hypersensible et a du mal à appréhender la société autour de lui. Son comportement en décalage pousse l’école à poser un ultimatum à Théo, le père : Robin doit prendre un traitement médicamenteux ou il ne sera plus autorisé à venir. Théo refuse et commence l’école à la maison, ce qui est une épreuve pour le père comme pour le fils. Ils trouvent refuge dans les étoiles et exoplanètes grâce à Théo qui est astrobiologiste et imagine comment la vie pourrait être ailleurs dans l’espace, ce qui fascine Robin qui est d’une curiosité insatiable. Ce qui va aussi les lier, c’est une expérimentation à laquelle Robin participe : le neuro feed-back avec une intelligence artificielle.
C’est un roman sur la relation touchante d’un père et son fils, qui relie l’infiniment petit et l’infiniment grand, une relation pleine de tendresse et de complicité poétique, Robin est un garçon hors norme auquel on s’attache immanquablement. C’est un livre brillant servi par une écriture d’une grande sensibilité.
Salomé